Chrawnique littéraire : Mise à jour

J’ai un rapport très particulier avec la poésie, non pas parce que j’en écris aussi, mais parce que de mon point de vue il n’y a pas d’écrit qui permette mieux l’interrogation, le regard sur le monde, qu’elle. Elle s’attaque aux sens, formée ou déformée, et invite à la philosophie et à la contemplation.

Le cas ici avec Mise à jour, recueil de poèmes de Tristan Vodak publié aux toutes jeunes Éditions du Bunker, qui explore le rapport à notre époque digitale, dépiaute le thème de la machine au cœur de l’humain : est-ce que cela nous rend, nous, moins humains ? Qu’est-ce que le règne de l’image dans le rapport à l’autre, de nos jours ?

Au moyen d’un champ lexical double fait de courants servant de fusibles à sa prose, Vodak s’affranchit de la forme pour électrifier un fond souvent surréaliste, ce qui n’est pas pour me déplaire, moi qui vois des nuages dans mon café sans jamais y verser de lait.
Sa plume est sans fioritures mais subtile, elle invite à l’évasion, percute, puis s’en va de nouveau voguer, on y lit des amours déçus faits de pixels et des aventures ancrées dans la folie de ce présent qui nous échappe souvent. Il s’y ressent une rage dépitée, un saut empêché, les désirs contrariés.

Étrangement, ce tout nous pousse en avant, on a envie d’y croire en bons nihilistes optimistes que nous sommes.

« Chacun a poussé par espoir
l’eau qui cacherait l’espoir
et en se mouillant, chacun a déjà eu la fièvre
de croire que ça sécherait

je nage depuis longtemps
j’ai appris très jeune à flotter
et je crois parfois encore savoir voler

voir venir l’horizon, aimer le ciel
reste possible et apaise
mais je n’attends plus de plage

j’attends le courant. »

Mise à jour, de Tristan Vodak, aux Éditions du Bunker, 2024