Les droits de l’homme veulent-ils encore dire quelque chose ?

À l’heure où les crises géopolitiques se multiplient et où les inégalités s’exacerbent, une question se pose avec acuité : que sont devenus les droits de l’homme ? Ont-ils encore un sens ou ne sont-ils qu’un idéal galvaudé, brandi selon les intérêts des puissants ?
La Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée en 1948, incarnait une promesse : celle d’un monde où chaque être humain serait protégé par un socle universel de droits inaliénables. Liberté d’expression, droit à un procès équitable, protection contre la torture et la discrimination… autant de principes que les nations du monde s’engageaient à défendre. Pourtant, 75 ans plus tard, cette promesse semble fissurée.
L’érosion d’un idéal
De la guerre en Ukraine aux répressions en Iran, en passant par les inégalités criantes dans les démocraties occidentales, les violations des droits de l’homme sont omniprésentes. Même dans les pays qui se prétendent d’être les champions de ces droits, des politiques migratoires inhumaines, des discriminations systémiques et des atteintes à la vie privée, exacerbées par les technologies de surveillance, sont devenus monnaie courante. Les droits de l’homme sont-ils devenus un outil rhétorique, permettant de dénoncer les adversaires tout en ignorant les abus domestiques ? Cette instrumentalisation sape leur crédibilité et leur universalité.Une humanité fragmentée
La montée des nationalismes et des régimes autoritaires accentue cette crise. Lorsque les États subordonnent les droits de l’homme à la souveraineté nationale, l’idée même d’universalité est mise à mal. Les réfugiés sont refoulés aux frontières, les minorités opprimées et les militants des droits humains persécutés. La solidarité internationale semble s’être effacée au profit de l’indifférence, parfois même dans les discours publics : « Ce n’est pas notre problème. » Mais cette fragmentation n’est pas seulement politique. Elle est aussi économique et sociale. Les droits de l’homme, tels qu’ils sont formulés, suffisent-ils face aux défis contemporains ? Comment parler de droits fondamentaux à une personne vivante dans l’extrême pauvreté, sans accès à l’eau potable ni à une éducation de base ? Comment garantir la dignité humaine dans un monde où la crise climatique menace de priver des millions de personnes de leur habitat ?Un concept à réinventer ?
Face à ces défis, certains remettent en question le cadre même des droits de l’homme. Doivent-ils évoluer pour répondre aux problématiques du XXIe siècle ? Des concepts comme les droits environnementaux ou les droits numériques émergents comme des prolongations naturelles, mais ces ajouts suffisent-ils à relancer leur pertinence ? Peut-être est-il temps de redonner du sens aux droits de l’homme en renforçant les mécanismes de leur application. Il ne s’agit plus seulement de proclamer des principes, mais d’agir pour les défendre, partout, pour tous.Un appel à la vigilance
En tant que citoyens, journalistes ou défenseurs des libertés, nous portons une responsabilité collective : celle de maintenir vivants les reconnus des droits de l’homme. Face à l’apathie, nous devons poser les questions qui dérangent. Pourquoi certains droits sont-ils exclusivement bafoués ? Pourquoi l’indignation est-elle si sélective ? Si les droits de l’homme veulent encore dire quelque chose, alors nous devons leur redonner leur véritable vocation : celle d’être le rempart ultime contre la barbarie, et non un outil de propagande. Cela exige du courage, de l’action, et surtout, une foi renouvelée en notre capacité à bâtir un monde plus juste. Alors, la question reste posée : les droits de l’homme peuvent-ils encore être un langage commun dans un monde si divisé ? À nous tous d’y répondre, dans nos choix, nos engagements et nos combats du quotidien.Retrouvez-nous
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